Depuis près d’un an maintenant, je dédie une partie de mon temps à la Fédération Française de Badminton au sein du Pôle France Relève du CREPS de Strasbourg, faisant grimper ainsi mon compteur à 14 disciplines sportives différentes dans mes accompagnements.
Qu’est-ce qui m’a amenée à dire oui à cette proposition alors que jusqu’ici, le Bad pour moi, c’était uniquement avec un verre de rosé et des merguez pendant les barbecues d’été ?
Tout d’abord, parce que je marche au challenge, j’aime la nouveauté. Parce que je suis persuadée qu’exercer dans un nouvel environnement me pousse chaque jour à découvrir, à apprendre, à innover et à m’enrichir pour ensuite réinvestir et partager toutes ces connaissances et ces compétences, pour les mettre au service de mes accompagnements. Je dis toujours qu’on est la somme de sa rencontre avec les autres. Là où certains parleront d’éparpillement, je n’y vois qu’un up-grade de mon métier. Parce que le point commun entre toutes ces disciplines, c’est l’Humain. L’humain et son fonctionnement, l’humain « matière noble » qui fait également tourner la machine entreprise, je fais d’ailleurs toujours le parallèle entre le monde du sport et celui de l’entreprise lors de mes missions en tant que consultante : devant des visages parfois interloqués de certains dirigeants ou managers, j’avance qu’ils sont aussi des sportifs de haut niveau, qui jouent simplement sur un autre terrain et avec un autre ballon ;)
Ensuite, j’ai accepté de travailler avec le Pôle France Relève pour des raisons « sociologiques et démographiques » : 1) cela me permettait de féminiser un tout petit peu plus ma clientèle, qui était jusque-là composée à 95 % d’un public masculin, et j’avoue que ça me fait du bien… 2) cela me permettait aussi de rajeunir encore l’âge moyen des athlètes que j’accompagne… secret pour me sentir toujours jeune peut-être (surtout quand ils me disent « on a joué des vachement vieux aujourd’hui, ils étaient nés en 1998 ») ? Trêve de plaisanterie, c’est surtout qu’étant plutôt d’une nature projective, je pense tout simplement que les jeunes c’est l’avenir !
Outre les séances individuelles où chacun avance sur ses propres aptitudes et compétences, ainsi que les séances de Préparation Mentale intégrée en grand groupe, l’accompagnement mené avec les paires (Double Hommes – Double Dames – Doubles Mixte) est complété par des séances en binôme. Je travaille avec des équipes complètes en sport collectifs, mais je perçois dans la relation duelle des paires de badistes un niveau de complexité et de singularité que je ne retrouve nulle part ailleurs ; ce qui rend l’accompagnement encore plus riche et plus intéressant. J’articule mon intervention autour de 2 axes essentiels :
1) Dialoguer autour d’une vision commune :
Le badminton, bien que souvent perçu comme un sport individuel de manière globale, est bien différent en double et offre une dimension stratégique et sociale complexe. Une paire de double solide en badminton n’est pas le simple produit du hasard, mais le résultat d’une synergie méticuleusement élaborée entre deux joueurs. Former une bonne équipe de double nécessite une énergie subtile et un équilibre constant entre les deux partenaires, mais aussi des ressorts techniques et psychologiques. Pour reprendre une célèbre citation des Inconnus, posons-nous la question « C’est quoi un bon joueur de double ? » Je serai tentée de dire qu’en fait, il n’y a pas de bon joueur de double, il n’y a que des bonnes paires de double. Bien sûr, il y a des secteurs clés : le service, le retour, dont la maîtrise permet plus facilement d’exceller dans la discipline.
Mais une paire idéale réunit des compétences complémentaires, permettant aux joueurs de se soutenir et de se renforcer mutuellement. La communication joue un rôle crucial : elle ne se limite pas aux mots ; elle s’exprime aussi à travers le langage corporel et la compréhension tacite des intentions de l’autre. Cela passe donc par une compréhension mutuelle des forces et faiblesses de chacun, pour pouvoir adopter un style de jeu et des tactiques en corrélation avec ces derniers. Avoir une vision commune est un élément fondamental pour le succès d’une paire de double en badminton. Cette vision partagée englobe bien plus que la simple intention de gagner ; elle représente une compréhension mutuelle des objectifs, des stratégies de jeu, et même des valeurs et attitudes envers le badminton. Pour qu’une paire fonctionne, chaque joueur doit non seulement connaître ses propres aspirations et son style de jeu, mais aussi comprendre et être capable de s’aligner sur ceux de son partenaire. Cela implique également une approche coordonnée pendant le jeu. Les décisions prises en une fraction de seconde sur le terrain doivent être le reflet d’une stratégie préalablement convenue. Cela signifie que les partenaires doivent être capables d’anticiper les réactions et les décisions de l’autre. Un tel niveau de compréhension ne se développe que par la pratique régulière et la réflexion commune après les matchs et les sessions d’entraînement, où l’on construit les attitudes et comportements indispensables au bon fonctionnement de la paire : mettre en place des routines d’encouragements, savoir identifier quand le partenaire est sous pression, comment remettre la pression sur l’adversaire, quel langage corporel et oral adopter… Les paires qui dialoguent sur ces « détails » tendent à avoir une meilleure cohésion et davantage de résilience, ce qui est crucial dans les moments critiques des matchs, notamment lors de rallyes ou dans les Money Time !
2) Partager et assumer les responsabilités :
Le joueur qui assume le rôle de leader doit être capable de diriger le jeu, de prendre des décisions rapides et stratégiques, et de guider son partenaire à travers des communications efficaces. Cette domination dans le jeu n’implique pas de minimiser le rôle du second joueur, mais plutôt de créer une dynamique où le leader agit comme le point focal, dirigeant les échanges et stratégies tout en exploitant au maximum les compétences de son partenaire. Le deuxième joueur se concentre sur le soutien, la couverture des espaces laissés par le leader, et l’anticipation des besoins du jeu. Pour faire simple, l’un prend les risques et l’autre est le pilier de la paire. À noter que la responsabilité du leadership peut et doit être échangée entre les partenaires, en fonction de la situation de jeu, des points forts de chacun, des stratégies adverses et des niveaux de jeu et des moments du match… Avoir cette flexibilité permet de s’adapter rapidement sans y laisser trop de plumes ! Il faut néanmoins avoir de la lucidité, une connaissance parfaite de son partenaire et enfin communiquer durant le jeu pour intervertir les rôles ! La paire crée ainsi une synergie où les rôles et responsabilités sont clairement définis, tout en restant suffisamment flexible pour s’adapter à chaque situation. Enfin, cette notion de responsabilité passe également par du respect mutuel et une attitude positive, piliers essentiels dans le succès de la paire en badminton. J’ai en tête une paire, où l’une des joueuses a tendance à avoir un langage corporel « trop prononcé ». La plupart du temps, cela lui permet d’extérioriser une frustration envers elle-même et non envers son ou sa partenaire, mais cela n’était pas toujours perçu ainsi par le public et parfois même par le partenaire. Nous travaillons autour de cet élément : que l’une puisse s’exprimer et éloigner sa frustration sans que l’autre en soit « contaminé » émotionnellement, mais aussi que le second arrive à prendre de lui-même de la distance à cet égard, voire à « ramener » sa partenaire dans de meilleures dispositions. Next Point Mentality. Dans l’intensité d’un match, où chaque point peut être crucial, maintenir une dynamique positive est tout aussi important voire plus que les compétences techniques. Exprimer à haute voix ses encouragements, surtout dans les moments difficiles, valoriser les efforts de son partenaire, le soutenir en cas de faute… Ces « simples habitudes » peuvent changer l’issue d’un match ! Cette approche renforce la résilience de la paire et concoure à s’adapter ensemble aux situations de jeu, les joueurs seront plus aptes à gérer la pression et à rester concentrés mais aussi plus enclins à progresser et à performer…
J’ai l’opportunité « d’être sur la chaise » lors de différents tournois, quasiment toujours aux côtés d’un collègue « technicien », et je crois savoir que justement, les joueurs apprécient cette complémentarité au coaching, où j’accompagne principalement la partie émotionnelle, la concentration ; là où mon collègue rappelle les fondamentaux stratégiques, drive la partie tactique et technique. Et si j’ai choisi cette photo de couverture en particulier pour illustrer cet article, c’est bien que l’essentiel de mon métier est d’être derrière eux, et lorsqu’après un coaching certains badistes me disent « merci » je leur réponds toujours « c’est vous qui avez fait le boulot ».